La création d’un label « Made in Africa » incarne une aspiration majeure pour un continent encore marginalisé dans les chaînes de valeur mondiales. Une étude récente, menée conjointement par la Confédération Générale des Entreprises du Maroc (CGEM) et la Banque Africaine de Développement (BAD), a mis en lumière l’urgence et le potentiel d’une telle initiative. Présentée par Abdou Diop, président de la commission Afrique de la CGEM, lors du Forum de la PME Africaine à Rabat, cette étude brosse un tableau contrasté : des opportunités énormes, mais des défis tout aussi colossaux.
Pendant des décennies, l’Afrique s’est contentée d’un rôle subalterne, exportant ses matières premières brutes et dépendant des produits finis venus d’ailleurs. Les bénéfices de ses immenses richesses naturelles échappent en grande partie à ses populations, au profit d’autres régions du monde. L’étude insiste sur la nécessité de rompre avec ce modèle historique en capitalisant sur des normes de qualité harmonisées, une meilleure connectivité régionale et des chaînes de valeur intégrées.
Cette ambition ne saurait se concrétiser sans une collaboration étroite entre le secteur public et le secteur privé. Alors que le premier est appelé à garantir un climat d’affaires propice grâce à un cadre réglementaire adapté et des investissements stratégiques dans les infrastructures, le second doit jouer un rôle moteur en innovant et en investissant dans des secteurs porteurs. Le Forum de la PME Africaine, qui s’inscrit dans la continuité du dialogue des patronats africains initié à Casablanca en 2022, reflète cette volonté commune de bâtir un avenir économique plus inclusif.
La zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf) offre une chance inédite de stimuler le commerce intra-africain et de créer des écosystèmes économiques résilients. L’étude identifie des secteurs stratégiques comme l’automobile, l’agroalimentaire, le textile ou encore l’électronique, autant de domaines où l’Afrique peut se positionner en leader mondial. Mais cette ambition suppose de relever des défis structurels majeurs. Le manque d’infrastructures, le coût élevé de l’énergie et la faible connectivité des transports constituent autant d’obstacles à surmonter. La transition énergétique, souvent perçue comme un fardeau, pourrait au contraire représenter un levier essentiel pour bâtir une industrie compétitive et durable.
L’Afrique ne manque ni de talents ni de ressources. Son capital humain, jeune et dynamique, est un atout de taille dans cette course à la réinvention économique. Pourtant, il reste sous-exploité, faute de formations adaptées aux besoins du marché. Le développement des compétences doit aller de pair avec l’industrialisation pour permettre à des millions de jeunes Africains de participer activement à cette transformation.
Le chemin est long, mais les bases sont posées. La question n’est pas de savoir si un label « Made in Africa » verra le jour, mais plutôt quand il marquera le début d’une nouvelle ère pour le continent.