Face à une instabilité chronique dans la région sahélienne et à une fragmentation croissante des alliances internationales, le Maroc propose une approche innovante pour structurer une coopération régionale au sein de l’espace atlantique. Doté d’une position géographique stratégique et d’une diplomatie proactive, le Royaume entend relever les défis d’un environnement marqué par des tensions géopolitiques, des crises sécuritaires et des enjeux économiques.
Des enseignements mondiaux, des obstacles locaux
Les exemples internationaux de coopération régionale, qu’ils soient européens ou américains, offrent des leçons précieuses. En Europe, les ambitions d’intégration sont freinées par des divergences politiques et économiques croissantes. En Amérique du Sud, des initiatives comme le Mercosur ou l’Unasur se heurtent à des divisions internes et à une vision fragmentée. Ces échecs mettent en évidence les écueils que le Maroc doit éviter pour que son initiative atlantique puisse prospérer.
Au cœur de cette dynamique, le Sahel reste une région critique. Avec plus de 36 millions de personnes déplacées et une croissance économique limitée à 3 % en 2024, selon la Banque mondiale, les enjeux sont colossaux. L’instabilité sécuritaire et la pauvreté endémique rendent toute initiative de coopération particulièrement complexe.
Une vision de coopération et de prospérité
Pourtant, le Maroc bénéficie d’atouts indéniables. Son réseau portuaire, avec des infrastructures de pointe comme le port Tanger Med et le projet Dakhla Atlantique, en fait une plaque tournante des échanges économiques. Sa diplomatie africaine active, combinée à des projets structurants tels que le gazoduc Nigeria-Maroc, conforte sa position de leader dans la région. Ces initiatives visent à relier les zones de production de gaz du golfe de Guinée à l’Europe, tout en stimulant l’intégration économique entre les pays riverains de l’Atlantique.
Cependant, pour réussir, le Maroc devra adopter un modèle souple d’intégration, s’appuyant sur une coopération ciblée dans des secteurs stratégiques. L’histoire européenne de l’intégration, centrée initialement sur le charbon et l’acier, montre que des objectifs bien définis et des échéanciers réalistes sont essentiels pour garantir une dynamique durable.
Une toute nouvelle doctrine économique pour l’Afrique Atlantique ?
Pour assurer la pérennité de son initiative, le Maroc pourrait envisager la création d’une doctrine économique africaine commune. Celle-ci viserait à développer des offres adaptées aux spécificités des pays du Sahel et de l’Atlantique, tout en favorisant un transfert de savoir-faire. En conciliant les besoins des pays enclavés avec une vision intégrée de développement, cette approche permettrait de construire une dynamique régionale cohérente et inclusive.
Un horizon diplomatico-économique prometteur
Le positionnement géographique unique du Maroc, conjugué à sa vision stratégique, le place en tête des acteurs capables de transformer les défis régionaux en opportunités. En travaillant de concert avec des partenaires africains, le Royaume ambitionne de jeter les bases d’une coopération atlantique qui redéfinirait les rapports de force économiques et géopolitiques dans la région.
Pour réussir, cependant, il devra maintenir un équilibre délicat entre ses ambitions de leadership et les réalités complexes de la région. Les projets comme le port de Dakhla Atlantique ou le gazoduc Nigeria-Maroc incarnent cette ambition. Ils ne sont pas seulement des infrastructures ; ils symbolisent une vision qui aspire à faire de l’Atlantique un espace de prospérité partagée, en connectant des nations et en renforçant leur interdépendance économique.
Le Maroc trace ainsi la voie d’une intégration pragmatique et réaliste, en s’appuyant sur son héritage diplomatique et ses ressources stratégiques. Un modèle qui pourrait inspirer d’autres régions du monde confrontées à des défis similaires.
